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Choisir le futur de l’Antarctique

L’Antarctique et l’océan austral sont étroitement connectés avec le reste du Globe et les choix en la matière auront des conséquences à long terme pour cette région et la planète entière. C’est la conclusion d’une étude scientifique internationale et multidisciplinaire parue dans la revue Nature.

Les choix qui seront faits au cours des dix prochaines années, et les changements environnementaux et climatiques qui en résulteront, auront des conséquences à long terme pour cette région et la planète entière.

Cette nouvelle étude confronte deux récits possibles pour le futur de l’Antarctique et de l’océan austral. Chaque récit est celui d’un observateur qui en 2070 regarderait rétrospectivement ce qui se serait produit au cours des 50 dernières années. Cette approche met en lumière les conséquences à long terme des décisions qui seront prises dès maintenant et dans un futur proche. Ces deux scénarios sont des descriptions de futurs plausibles plutôt que des prévisions.

En cas d’émissions élevées de gaz à effet de serre…
Dans le premier scénario, les émissions de gaz à effet de serre ne sont pas maîtrisées et le réchauffement climatique s’accentue. Peu d’actions sont entreprises pour réguler les facteurs environnementaux et sociaux ayant un impact sur l’Antarctique. L’Antarctique et l’océan austral subissent alors un changement climatique et environnemental rapide et de grande étendue, avec des conséquences à l’échelle globale.

En 2070, le réchauffement de l’océan et de l’atmosphère a engendré une importante perte des principales plateformes de glace flottantes, entraînant une accélération de la perte de glace depuis l’inlandsis antarctique et une accélération de l'élévation du la montée du niveau de la mer.
  • Les changements environnementaux, dont le réchauffement, le retrait de la banquise et l’acidification de l’océan ont altéré les écosystèmes marins.
  • La croissance incontrôlée de l’exploitation de l’Antarctique a de surcroît dégradé l’environnement et introduit des espèces invasives.

Avec des émissions réduites de gaz à effet de serre…
Dans le second scénario, les émissions de gaz à effet de serre sont réduites et la mise en œuvre d’une politique efficace limite les pressions anthropiques sur l’environnement.
Ces actions conduisent à un changement modéré en Antarctique, qui en 2070 reste encore semblable à son état lors des premières décennies du XXIème siècle.
  • Les plateformes de glace flottantes de l'Antarctique sont restées quasiment intactes, ce qui limite les risques de montée du niveau des mers.
  • L’acidification a été maîtrisée et les écosystèmes de l’Antarctique sont demeurés globalement intacts.
  • La pression anthropique sur l’Antarctique est gérée par une gouvernance internationale de plus en plus efficace et collaborative.

Les auteurs de l’étude, coordonnée par l’océanographe australien Steve Rintoul1, alertent donc sur le fait que l’évolution de l’Antarctique au cours des 50 prochaines années dépend des choix faits dès aujourd'hui.

« Réduire dès cette décennie les rejets de gaz à effet de serre mondiaux est essentiel pour limiter le risque de changements irréversibles dans l’Océan austral, et éviter une accélération de la montée du niveau des mers liée à une déstabilisation de la calotte de glace de l’Antarctique », explique Valérie Masson-Delmotte, paléo-climatologue au CEA2 et co-autrice française de cette publication internationale.

« L'avenir de l'Antarctique est lié à celui du reste de la planète et de la société humaine. Des mesures doivent être prises maintenant pour ralentir le rythme des changements environnementaux, augmenter la résilience de l'Antarctique et réduire le risque que nous nous engagions dans des changements irréversibles ayant un impact généralisé », précise M. Rintoul.


L’Antarctique et l'océan Austral en 2070, selon des scénarios de « faible émissions / action forte » (à gauche) et « émissions élevées / faible action » (à droite). Les différences sont relatives à une période de référence de 1986 à 2005. © 2018 Macmillan Publishers Limited, part of Springer Nature.
Informations complémentaires
Notes
1 Au sein du Centre de recherche sur les océans de l'hémisphère sud (CSHOR) et du Centre de recherche coopérative sur le climat et les écosystèmes de l'Antarctique (ACECRC), à Hobart en Australie.
2 Au sein du Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement (LSCE, CEA-CNRS-UVSQ-IPSL).
3 Le prix Tinker-Muse est décerné chaque année à une personnalité ayant apporté une contribution significative, dans le champ scientifique ou politique, à la compréhension ou à la préservation de l’Antarctique. Inspiré par la passion de Martha T. Muse pour l’Antarctique, ce prix a été créé à la suite de l’Année polaire internationale 2007-2008. En 2015, Valérie Masson-Delmotte, paléo-climatologue au CEA a reçu ce prix.
Les auteurs, tous lauréats du prix prestigieux Tinker-Muse pour leurs recherches autour du continent Antarctique3, sont des experts dans des domaines variés, tels que la biologie, l’océanographie, la glaciologie, la géophysique, les sciences du climat, et également les réglementations liées à l’environnement.
Références
Nature, 13th June 2018, https://doi.org/10.1038/s41586-018-0173-4